Lettre ouverte du Front Féministe aux parlementaires européen-ne-s


 71 organisations de 7 pays

https://collectif-libertaire-antisexiste.blogspot.com/2023/02/depuis-le-15-mars-2022-nous-sommes.html

 English text below

 

LETTRE OUVERTE

AUX PARLEMENTAIRES EUROPÉEN·NES

13 février 2023

Objet : Directive sur « la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique » devant être votée par le Parlement européen

 

Mesdames et Messieurs,

La convention du Conseil de l'Europe sur « la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique », dite convention d'Istanbul , date de 2011. Depuis lors, de nouvelles possibilités technologiques ont entraîné de nouvelles formes de violences masculines contre les femmes. La Commission européenne a rédigé en mars 2022 un projet de directive traitant de toutes les formes de violence contre les femmes, afin d’obliger les États-membres à prévenir ces violences et à lutter contre elles.

Tout en saluant cette initiative, nous exprimons notre inquiétude à la lecture du texte initial de la Commission, des propositions des rapporteures (rapports rendus le 13 décembre 2022) et des débats en commission.

Nous nous exprimons au nom du Front Féministe, collectif international engagé pour les droits des femmes et contre les violences qu’elles subissent. Il groupe 71 organisations de 7 pays (Allemagne, Belgique, Canada, Espagne, États-Unis, France et Italie), dont plusieurs groupent au total des centaines d’associations.


1/ Nous dénonçons la confusion entre sexe et genre qui invisibilise les femmes.

Le projet de directive utilise les expressions « violence de genre », « égalité de genre » et « stéréotype de genre ». Il met sur le même plan le sexe et le genre : par exemple, « quel que soit son sexe ou son genre » (a.4 § (c) définition du terme « victime »).

La commission EMPL demande que l’expression « harcèlement sexuel au travail » soit remplacée par « violence fondée sur le genre et harcèlement sexuel au travail ».

Enfin, le groupe des Verts a soumis une liste d’amendements où l’expression « actes de violences contre les femmes » est systématiquement remplacée par « violence fondée sur le genre », ainsi définie : « "violence fondée sur le genre’’ signifie violence, ou menaces de violence dirigées contre une personne en raison de son genre, de son identité de genre, de son expression de genre ou de ses caractéristiques sexuelles », définition dont le mot « femme » a disparu.

Rappelons que « sexe » et « genre » n’ont pas le même sens : le « sexe » est une réalité biologique, tandis que le « genre » désigne l’ensemble des stéréotypes culturels sexo-spécifiques assurant la domination patriarcale des hommes sur les femmes, stéréotypes que les féministes combattent.

L’expression « violence de genre » euphémise la violence et élude la question de la responsabilité des auteurs.

Nous demandons le maintien de l‘expression « violence masculine contre les femmes ». De même, « égalité des femmes et des hommes » doit être systématiquement substitué à « égalité de genre ».


2/ Nous dénonçons les pressions pour éliminer le viol de la liste des violences contre les femmes : le faire viderait la directive de son sens et serait l’indice d’une régression grave, alors que l'Union européenne défend le droit des femme à vivre en sécurité.


3/ Nous contestons l’emploi de l’expression « travailleuse du sexe » qui masque et normalise l’exploitation sexuelle des femmes dans la prostitution et la pornographie, et les violences qu'elles y subissent. Cette formulation figure dans des amendements qui seront discutés prochainement.

Nous demandons de la remplacer par « femme en situation de prostitution », ou « victime de l’industrie pornocriminelle ».


4/ Alors que l’objet de la Directive est l’éradication des violences contre les femmes et les filles, le souhait d’étendre sa portée aux « groupes discriminés pour leur orientation sexuelle ou leur identité de genre, aux personnes trans, aux personnes LGBTQI, aux minorités sexuelles et de genre » l’en détourne.

En effet, la catégorie de sexe (différences biologiques et anatomiques entre les femmes et les hommes) doit primer sur d’autres qui invisibilisent ou brouillent celle du sexe, ce qui empêche de collecter des données sur les violences masculines contre les femmes.

Lesdites « minorités de genre » n’ont ni la même histoire ni le même vécu que les femmes, et doivent faire l’objet d’une autre directive ; en effet, il est incohérent, dans une directive consacrée aux femmes et aux filles, d’inclure des hommes homosexuels.

Nous demandons que cette directive, axée sur l’éradication des violences contre les femmes et les filles, traite uniquement des femmes et des filles.

Enfin, nous suggérons une catégorisation plus structurée des violences, selon leur origine : sexisme et misogynie, exploitation sexuelle dans la prostitution et la pornographie, exploitation reproductive des femmes.

Veuillez croire, Mesdames et Messieurs, à nos sentiments respectueux.

Marie-Noëlle Bas, Gérard Biard et Florence Montreynaud, responsables du Front Féministe <front.feministe@gmail.com>

 

 

 

OPEN LETTER

TO THE EUROPEAN PARLIAMENTARIANS

February 13, 2023



Subject: Directive on "combating violence against women and domestic violence" to be voted by the European Parliament


Ladies and Gentlemen,

The Council of Europe Convention on "Preventing and Combating Violence against Women and Domestic Violence", known as the Istanbul Convention, dates from 2011. Since then, new technological possibilities have led to new forms of male violence against women. The European Commission has drafted in March 2022 a directive dealing with all forms of violence against women, in order to oblige member states to prevent and combat such violence.

While welcoming this initiative, we express our concern after reading the initial text of the Commission, the proposals of the rapporteurs (reports delivered on 13 December 2022) and the debates in committee.

We speak on behalf of the Feminist Front, an international collective committed to women's rights and against the violence they suffer. It groups 71 organizations from 7 countries (Belgium, Canada, France, Germany, Italy, Spain and the United States), several of which group together hundreds of associations.


1/ We denounce the confusion between sex and gender which makes women invisible.

The draft directive uses the expressions "gender violence", "gender equality" and "gender stereotype". It equates sex and gender: for example, "regardless of sex or gender" (a.4 § (c) definition of "victim").

The EMPL Committee requests that the term "workplace sexual harassment" be replaced with "gender-based violence and workplace sexual harassment."

Finally, the Green group submitted a list of amendments in which the expression "acts of violence against women" is systematically replaced by "gender-based violence", defined as follows: "'Gender-based violence' means violence, or threats of violence, directed against a person because of his or her gender, gender identity, gender expression or sexual characteristics", from which the word "woman" has been removed.

It should be remembered that "sex" and "gender" do not have the same meaning: "sex" is a biological reality, while "gender" refers to the set of sex-specific cultural stereotypes that ensure the patriarchal domination of men over women, stereotypes that feminists are fighting.

The expression "gender violence" euphemizes violence and evades the question of the responsibility of the perpetrators.

We ask that the expression "male violence against women" be maintained. Similarly, "equality of women and men" must be systematically substituted for "gender equality".

2/ We denounce the pressure to eliminate rape from the list of violence against women: to do so would empty the directive of its meaning and would be an indication of a serious regression, while the European Union defends the right of women to live in safety.

3/ We contest the use of the expression "sex worker" which masks and normalizes the sexual exploitation of women in prostitution and pornography, and the violence they suffer. This wording is included in amendments that will be discussed soon.

We ask to replace it by "woman in a situation of prostitution", or "victim of the pornocriminal industry".

4/ While the purpose of the Directive is to eradicate violence against women and girls, the desire to extend its scope to "groups discriminated against on the basis of their sexual orientation or gender identity, trans persons, LGBTQI persons, sexual and gender minorities" detracts from this.

Indeed, the category of sex (biological and anatomical differences between women and men) must take precedence over others that invisibilize or blur the category of sex, thus preventing the collection of data on male violence against women.

These "gender minorities" do not have the same history or experience as women and should be the subject of a different guideline; indeed, it is inconsistent to include homosexual men in a guideline on women and girls.

We ask that this directive, focused on the eradication of violence against women and girls, deal only with women and girls.

Finally, we suggest a more structured categorization of violence, according to its origin: sexism and misogyny, sexual exploitation in prostitution and pornography, reproductive exploitation of women.

Please accept, ladies and gentlemen, our respectful sentiments.

Marie-Noëlle Bas, Gérard Biard and Florence Montreynaud, leaders of the Feminist Front <front.feministe@gmail.com>

 

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